L’école de création numérique e-artsup a organisé un débat sur le design de presse en ligne le 7 avril 2009 en partenariat avec Adobe et la revue Étapes. Alors qu’on s’interroge souvent sur les modèles économiques de la presse en ligne, le parti-pris de Peter Gabor, directeur de l’école e-artsup, était d’explorer le développement de la presse numérique sous l’angle du design graphique, de l’ergonomie, de l’interactivité et des standards d’architecture de l’information. Réunis au Mac Mahon, Étienne Robial, Étienne Hervy, Nata Rampazzo et quelques autres designers et journalistes ont partagé leurs réflexions sur la portabilité des apprentissages du design graphique de la presse papier à la presse en ligne.
Quelle transition numérique pour la typographie ?
La typographie regroupe un ensemble de procédés de composition et d’impression des caractères qui se sont développés historiquement pour mettre en valeur les textes. La macro-typographie se concentre sur l’organisation de l’espace de lecture, sur l’articulation entre le texte et l’image et sur le passage d’un niveau de lecture à un autre. La micro-typographie, quant à elle, a pour objectif de maintenir l’attention du lecteur en soignant les détails du texte comme l’approche ou les césures.
Dès lors qu’on investit le web, on perd cette finesse typographique dans la mesure où les polices sont limitées, la résolution faible, les multicolonnages inexistants. Tous ces procédés auxquels le cerveau s’est habitué, et qui facilitaient la lecture, ne peuvent donc pas être exploités.
Le web offre en revanche de nouvelles possibilités puisque sa mise en forme est dynamique et non statique. Liens hypertextes, infographies animées et vidéos sont les nouvelles armes d’un médium dont les forces sont l’interactivité et la fluidité. Qu’en est-il du confort de lecture ? La tendance à reproduire les codes du papier sur le web peut engendrer des désagréments : on s’est par exemple habitué à lire en noir sur fond blanc sur le papier, mais physiologiquement on lit mieux en blanc sur fond noir sur un support éclairé. Les designers doivent dès lors s’interroger sur la stratégie à adopter sur le web. Faut-il s’inscrire dans la continuité des codes développés pour le papier ou au contraire entamer une rupture ?
Mettre l’ergonomie au service d’une information liquide
Au royaume de la fluidité qu’est le web, les ergonomes ne doivent pas uniquement penser la mise en forme des contenus mais aussi leur mise en mouvement. Cela est d’autant plus vrai que les moteurs de recherche permettent aujourd’hui d’arriver sur un site par les pages intérieures et non uniquement par la page d’accueil, ce qui signifie que la navigation du site doit pouvoir être clairement comprise de n’importe quel endroit du site.
L’indexation est aussi un défi important pour permettre aux lecteurs de se repérer dans l’information liquide disséminée sur le web. Alors que le support fini du papier permettait au journal de déployer son univers et de proposer une hiérarchisation de l’information correspondant à sa politique éditoriale, sur le web, c’est le lecteur qui fait son journal selon ses goûts et intérêts. Cela engendre une fragmentation du savoir sur laquelle les éditeurs web doivent se positionner : l’enjeu est-il de proposer un contenu de plus en plus personnalisé ou de redonner de la personnalité aux journaux web qui se ressemblent trop ? Dans cet écosystème, il faut repenser le statut du designer pour qu’il ne soit plus uniquement chargé de l’aspect esthétique des sites mais ait aussi son mot à dire sur l’architecture de l’information.
Concilier possibilités techniques et usages
Aujourd’hui on observe un certain mimétisme des solutions graphiques choisies par les médias. Les designers et journalistes sont en effet limités par des systèmes techniques encore archaïques, les obligeant par exemple à écrire pour être référencés ou à choisir des images parce qu’elles peuvent être rapidement importées. On peut avoir l’impression d’un retour en arrière : le web nous renverrait au Volumen avec sa lecture verticale alors que l’évolution historique nous avait fait prendre le chemin de la lecture horizontale avec le Codex.
Bien que les outils utilisés contraignent les possibilités d’expression esthétique, un tournant commence à s’engager pour mieux répondre aux besoins des utilisateurs. L’enjeu principal est de parvenir à proposer des contenus adaptés à des internautes de plus en plus mobiles. Contrairement à ce que l’on dit parfois, on n’a jamais autant lu, mais les internautes modulent de plus en plus leur lecture selon la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils sont capables de lire de façon linéaire et profonde mais aussi de lire des flux d’information ou de faire du zapping.
S’interroger sur l’avenir de la presse en ligne du point de vue du design incite à réfléchir à la manière dont on peut renouveler les modes d’organisation de la pensée pour s’adapter à la révolution numérique.
Liens :
Liens vidéo :
Partie 1 :
http://www.wat.tv/video/debat-art-sup-design-presse-1erfi_2hynn_.html
Partie 2 : manquante
Partie 3 :
http://www.wat.tv/video/debat-art-sup-design-presse-1ezps_2hynn_.html
Partie 4 :
http://www.wat.tv/video/debat-art-sup-design-presse-1ezvm_2hynn_.html
Partie 5 :
http://www.wat.tv/video/debat-art-sup-design-presse-1f61x_2hynn_.html
Partie 6 :
http://www.wat.tv/video/debat-art-sup-design-presse-1f6oq_2hynn_.html
Conférence audio :
http://www.typogabor.com/Son/debat_presse_en_ligne.mp3
PDF de présentation :
http://www.my-os.net/media/2009/CP_MacMahon_4.pdf